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Rainald Goetz

RAVE

(éditions suhrkamp)

 

Ce court roman cherche à rendre les impressions et les ambiances autour de la scène techno dans un style adapté aux divers états d’esprit qui traversent le narrateur; ainsi, le style se caractérise par des phrases courtes, souvent interrompues, fragments de dialogues entendus, pensées, commentaires des situations.

Les niveaux de pensée et de narration sont multiples.

Quelquefois la traduction se heurtera à des difficultés majeures, qu’elle ne pourra surmonter que par l’adaptation car l’auteur lâche lui-même consciemment prise face aux nombreuses possibilités d’expression littéraire, interrompt ses propres réflexions, pour les reprendre ou non, va quelquefois chercher son bonheur dans la formulation absurde.

Rainald Goetz s’astreint à chercher un style nouveau puisqu’il a pris d’office le parti de ne pas suivre les voies de la narration classique; cette recherche sera difficile car l’auteur veut saisir l’instant, ce qui est en principe impossible (puisque la parole est toujours déjà une re-présentation). Mais c’est paradoxalement dans cette impossibilité qu’il y a beaucoup de place pour dire les choses, les choses du passé, par exemple, qui marquent nécessairement l’instant vécu, ou les projets capotés, ou encore toute la frime merveilleuse des gens qui travaillent dans les divers médias techno, TV, revues, disques, se consumant dans une série de standards de communication qui possèdent tous leur équivalent français ou américain; et Goetz se cramponne pour saisir cet instant qui lui est si cher, y parvient parfois, presque malgré lui, dans l’instant même d’écrire, dans l’interruption, dans le collage, la superposition etc.

Les scènes sont diverses, appartements sombres, bars, hangars, rave-parties, et plus tard l’été d’Ibiza, peuplés par une faune atypique; le livre commence sur le "boum-boum" de la basse qui traverse les hauts-parleurs dans une soirée rave; puis peu à peu tout l’univers du narrateur, à travers les divers personnages rencontrés dans ses errances ou ses activités d’animateur de la scène techno, prend corps et gagne en plasticité.

Les sujets abordés sont multiples et interagissent constamment : sociologie, sexualité, drogues, voyages, musique, cinéma, télévision, presse...

C’est en transposant sur le plan littéraire les techniques du mixage propres à la musique techno que l’auteur fait naître chez le lecteur une impression d’ensemble, paradoxalement fragmentée, en lambeaux, mettant en scène avec une grande sincérité cette génération contradictoire, sans doute issue du cynisme des années quatre-vingt, qui s’extasie aujourd’hui dans les rave-parties et les love-parades du monde entier...

 

RAVE : des histoires au creux de la nuit...

 

"Mais que font ces oiseaux de nuit de tous leurs week-ends?... Ils écoutent de la musique et dansent. Ils sortent pour faire la fête, pour draguer, pour se défoncer. Ils pénètrent dans de sombres endroits où, sur la porte, un panneau indique : savoir qui je suis. - Qui es-tu? - Ils parlent et se comprennent sans entendre ce que l’autre dit. Les mots échangés ne collent pas. Il y a beaucoup de bruit et plein de monde. L’un des types, c’est Wirr. Un autre s’appelle Dark. Ils dansent et oublient ce qu’ils pensent. Quand arrivent le matin et d’autres drogues, quand le soleil brille et que l’été règne en maître, quand les humeurs sont traversées par la douceur, l’ouverture et les sentiments tendres, le récit s’envole loin dans les airs pour reprendre à Ibiza, quelques jours à la mer, sur la plage, en voiture, ou sur des pelouses munichoises; de jeunes filles y fleurissent, qui initient les jeunes gens à leur monde où l’on se touche et où l’on fait des trucs ensemble, où parfois ça pète...

Finalement, c’était plutôt mal barré, tout ça. Je pouvais écrire là-dessus. La scène : piaules assombries, chambres d’hôtel, petits groupes. Certains assis, glacés, devant la poudre blanche; immobiles et déchaînés : les dealers, la pensée, le triomphe de la négativité...

De méchantes histoires d’amitié et d’amour, de trahison de l’amour, quelquefois raides et nues, résolument sexuelles : une scène déchirée. Où mène-t-elle? - Quelque part, à chaque moment, l’une des personnes brutalement détruites par les excès de ce genre de week-ends se traîne sur la route des hommes, banale, quotidienne... il cherche subrepticement un journal pour connaître la date d’aujourd’hui; et il lit ces mots: Viens voir, étoile filante! "

 

L’auteur est né en 1954 et a fait des études de médecine et d’histoire. Il publie depuis 1983 des romans, des pièces de théâtre, des journaux et des chroniques chez Suhrkamp, a reçu de nombreux prix littéraires, et ses pièces de théâtre sont montées depuis 1987 à Bonn, Hambourg (Schauspielhaus), Francfort et Hannovre. Il est également l’auteur du CD Word (Eye Q Records/WEA, 1994). Rainald Goetz vit à Berlin.

 

à lire également
la traduction des dix premières pages de
Rave
par
Stefan Kaempfer

 

Site de l'éditeur :
http://www.suhrkamp.de